À Poudlard, le blason jaune et noir et le blaireau font
souvent l’objet de nombreux quolibets de la part des élèves des autres maisons.
Qui n’a jamais au moins plaisanté sur l’arrogance de Zacharias Smith ou sur l’extravagance
d’Ernie Macmillan ? Même chez les Moldus, la maison Poufsouffle ne trouve
pas autant de soutiens que pour les autres. Comment l’expliquer ?
On peut d’abord trouver une première piste en jetant un
regard sur les membres de Poufsouffle eux-mêmes, et plus particulièrement sur
leur caractère ou leur destin à travers la saga.
Cedric Diggory, le plus connu sans doute, symbolise à lui seul le problème que
rencontre la maison d’Helga Poufsouffle : brillant, loyal, aimable, il
meurt subitement sans avoir eu l’occasion de se défendre dans un combat
héroïque. Tonks subit le même schéma en étant Auror, courageuse,
métamorphomage, drôle, mais en mourant au dernier tome sans autre forme de
procès. Les familles de Susan Bones et
de Hannah Habbot sous toutes deux assassinées. Le destin des rares Poufsouffle
que l’on connaisse semble funeste.
On y trouve également de mauvais bougres. Justin Flint-Fletchley croit qu’Harry
est le descendant de Serpentard et raconte cette histoire à tous ses camarades.
Zacharias Smith fait preuve d’une agressivité et d’une curiosité mal placée qui
lui vaudra la colère de nombreux Gryffondor, en particulier celle de Ginny
Weasley. Ernie Macmillan, sans questionner sa bonhommie, est décrit comme un
personnage monté sur ressort, surexcité, et sans doute trop loquace…Quand on
sait à quel point Rowling compte sur ses personnages pour amener le lecteur
dans son univers, on peut se douter que de tels exemples n’incitent pas la
majorité des lecteurs à l’admiration, mais plutôt à la moquerie, à savoir le
sport international des années lycée.
Le second point relève de la symbolique. L’emblème de
Poufsouffle est un blaireau, sa directrice une sorcière joufflue du nom de
Pomona Chourave, qui s’occupe basiquement du jardinage, et son fantôme le moine
gras. Ses valeurs sont le travail, la justice, la patience, et la loyauté. Sa
maison s’occupe des élèves « qui restent », qui n’ont pas pu être
répartis dans les autres maisons. Pour ainsi dire, il ne s’agit pas des traits
les plus flatteurs ni les plus épiques dont on puisse rêver. Pour un adolescent
moyen, Poufsouffle n’a pas autant d’arguments pour plaire que ses trois camarades.
Il s’agit presque de marketing : les produits visibles et voyants,
tapageurs et tumultueux comme le téméraire Gryffondor ou l’ambitieux Serpentard
se vendent mieux à la jeunesse qu’un professeur de jardinage et un moine gras
qui chante sous un blaireau. Appartenir « à ce qui restent » n’a rien
de gratifiant. Surtout lorsqu’ils finissent bons derniers à chaque coupe de
Quidditch ou des quatre maisons.
Harry et Cédric, deux amis et loyaux adversaires. |
Pourtant, Rowling a fourni tous les éléments susceptibles de
susciter l’admiration du lecteur pour Poufsouffle. En vérité, quiconque a lu
les sept tomes pourra se trouver honoré d’appartenir à cette maison. Harry est
humble devant la mort, et cherche la justice toute sa vie. Il place l’amitié, l’amour,
au-dessous de tout, et se montre loyal en toutes circonstances, particulièrement
avec Dumbledore. Il se montre parfois impatient, et son impatience est punie. C’est
la branchiflore qui lui permet de survivre à la Première tâche, la mandragore
qui redonne la vie aux pétrifiés, des graines qui permettent aux jumeaux
Weasley de concevoir leurs facéties, et le pus de Bubobulb qui soigne l’acné.
La botanique symbolise la maison Poufsouffle de bien des manières : c’est
une amie qui se fait oublier, discrète, mais qui est indispensable. C’est un
elfe de maison qui fait le travail nécessaire, bien cachée. C’est l’ange qui œuvre
dans l’ombre.
D’après Rowling, Poufsouffle, c’est encore plus que ça. Le
sablier qui compte les points gagnés par la maison est remplit de diamants « comme
les élèves de cette maison. Certains à un état plus brut que d’autres. » Source twitter
Une citation trop méconnue de Rowling abonde dans le sens d’une réhabilitation
de ce que devrait être la maison Poufsouffle dans l’imaginaire collectif, c’est-à-dire
une famille composée d’individus extrêmement divers, mais qui partagent les
valeurs les plus fondamentales telles que la justice, la loyauté, l’amitié, et
l’humilité :
"Cela pourrait en surprendre certains, mais c'est la vérité. De bien des façons, Poufsouffle est ma maison préférée. Il y a un moment dans le dernier livre où chaque maison a le choix de relever le défi ou non... Les Serpentard, pour des raisons compréhensibles, décident qu'ils feraient mieux de s'abstenir de jouer. Les Serdaigle : certains décident que oui, certains décident que non. Les Poufsouffle restent, pratiquement comme un seul homme – comme les Gryffondor. Cependant, il y a beaucoup de casse-cous et de frimeurs chez les Gryffondor. C'est comme ça, simplement. Je suis une Gryffondor, j'ai le droit de le dire. Il y a la bravoure et il y a aussi la frime, et parfois les deux vont ensemble. Les Poufsouffle sont restés pour une autre raison. Ils n'essayaient pas de fanfaronner. Ils n'étaient pas téméraires. C'est l'essence de la maison Poufsouffle. Et mon aînée, ma fille Jessica, m'a dit quelque chose de très profond, il y a à peine quelques jours en fait. Elle m'a dit – et à propos, elle n'est pas à Poufsouffle – mais elle m'a dit, « Je pense que nous devrions tous vouloir être à Poufsouffle. » Je ne peux que vous dire que je ne serais pas déçue du tout d'être répartie à Poufsouffle. Donc ça me vexe un peu qu'on puisse le sentir comme ça." - Jo Rowling (Harry Potter: Beyond the Page, 11/10/2012)
De quoi faire réfléchir et reconsidérer, s’il en est besoin, l’opinion qu’on se fait de la maison Poufsouffle.
Pour reprendre une citation biblique, devenue citation de Tolkien dans le
Seigneur des anneaux, « Tous les trésors ne sont pas d’or ».